Greta et le climat : faux procès, vraie urgence, celle d’agir !

La dernière prise de position publique de Greta Thunberg aura fait parler d’elle. Malheureusement, les réactions se déchaînent une fois encore sur la forme plus que sur le fond. Politiques, entreprises et société civile : il est temps pour tous de déplacer le débat sur l’action

 

Marc-Elian Duffrene, chef de projet

Marc-Elian Duffrene, Chef de projet

Quand la forme fait oublier le fond

Le 23 septembre 2019, Greta Thunberg était invitée par le secrétaire général de l’ONU Antonio Gutteres à prendre la parole à l’ouverture du sommet de l’ONU pour le climat. Elle a rappelé le danger d’une passivité des sociétés face au dérèglement climatique, et le coût bien trop élevé de l’inaction pour les générations futures.

Ses appels répétés pour une prise de conscience massive des enjeux auxquels nos sociétés devront faire face d’ici la fin du siècle ont résonné au sein d’une grande partie de la jeunesse à travers le monde. Pourtant, ils n’auront pas manqué de susciter en parallèle une énième salve de critiques, portant moins sur le message que sur la messagère. Alors qu’elle entend être le porte-voix d’une communauté scientifique affairée à alerter les décideurs mondiaux sur le risque que nous encourons à mettre en péril les équilibres naturels, la jeune suédoise se voit confisquer la parole au prétexte que le ton employé est trop hostile, moralisateur ou théâtral… au détriment une nouvelle fois du débat de fond.

Un relais crucial des alertes scientifiques

Qu’on adhère ou non à la personnalité des lanceurs d’alertes environnementaux, là n’est pas la question. L’état de la planète se détériore, et les rapports d’experts se succèdent sans avoir l’audience que la gravité de la situation imposerait. Une étude publiée le 17 septembre 2019 par plusieurs laboratoires français revoit ainsi à la hausse les prévisions d’augmentation des températures moyennes, pouvant aller jusqu’à + 7°C par rapport à la période préindustrielle, selon le pire scénario.

Nos systèmes de production et de consommation d’énergie sont directement remis en cause, reposant pour l’essentiel sur des combustibles fossiles comme le pétrole, le gaz et le charbon, qui atteindront de toute façon leur pic de production dans les prochaines années ou décennies. La biodiversité mondiale est dans une situation critique, avec un rythme d’extinction d’espèces jamais atteint, comme le soulignait un rapport de l’IPBES en mai 2019. Enfin, le dernier rapport du GIEC, publié le 25 septembre 2019, revoit à la hausse les impacts liés au déséquilibre en carbone de la planète, renforçant le réchauffement et l’acidification des océans, ainsi que la fonte des glaciers.

Les entreprises en première ligne pour une trajectoire 2°C

Éluder ces réalités est-il un bon moyen de résoudre le problème ? Certainement pas. Nous nous devons d’agir collectivement sans plus attendre, et les entreprises doivent désormais être en première ligne dans ce combat. Les cycles de décisions politiques sont longs, d’autant plus longs qu’ils mêlent une pluralité d’acteurs aux intérêts souvent divergents. Il s’agit maintenant pour le secteur privé d’aller au-devant de la contrainte réglementaire, et de définir volontairement des stratégies de développement compatibles avec la trajectoire 2°C inscrite au sein de l’accord de Paris.

L’entreprise ne doit plus hésiter dans ses engagements. Selon le baromètre GreenFlex-ADEME 2023, les Français considèrent le réchauffement climatique comme le sujet le plus important à traiter concernant l’avenir de la planète, et 84 % d’entre eux considèrent que les entreprises et marques sont très importantes pour agir concrètement en faveur de la consommation responsable. Pour l’heure, elles sont pourtant trop peu nombreuses à avoir mis en place des objectifs compatibles avec un scénario 2°C, sans parler de définir et effectivement réaliser les plans d’actions pour y parvenir.

Il en va de même pour le secteur des TPE-PME – 4 millions d’entreprises en France – qui constituent à elles seules un formidable levier d’accélération de la transition, pour autant que ces dernières soient accompagnées dans leurs démarches et formées aux enjeux de la comptabilité carbone. Le défi à relever est important et les chantiers sont nombreux. Alors répondons à l’appel de la jeunesse, et agissons : « notre maison brûle » mais nous ne regarderons plus ailleurs.